lundi 24 février 2014

Fin de week-end

Une photo, quelques mots, sur une idée de ma copine Leil, du blog Bricàbook.
Voici ma première participation à ce challenge que je lis tous les lundis sur les blogs des copines, sans oser participer. 
Pourtant, la photo de cette semaine m'a particulièrement touchée. 
Alors je me suis prêtée au jeu d'écrire "quelques mots" inspirés par cette photo. 
Soyez indulgents... je débute! 


 © Kot
 @ Kot


J'ai toujours un peu peur, chaque fois que je fais ça, alors je reste les yeux rivés sur le hublot de la machine qui tourne, et j'en ai la nausée. C'est con...

La première fois, j'ai extirpé du tambour mes fringues, mélangées aux siennes,  devenues toutes roses. J'ai poussé un juron sonore, avant de m'écrouler sur l'un des fauteuils, exténué, tendu, prêt à craquer. Une jeune femme avait tourné la tête, surprise, dans ma direction. Un peu crispée à la vue d'un gars pas rasé, les yeux cernés, avachi sur ce siège, elle avait d'un coup éclaté de rire en portant les yeux sur mes mains : une chemise rose layette dans la main gauche, et des sous-vêtements rose bonbon, taille enfant, dans la droite, faut dire que j'étais ridicule.
Cela fait maintenant six mois que je me tape ce putain de rituel tous les dimanches soirs. Six mois que Nath' m'a foutu dehors, valises sur le palier et porte claquée au nez. 
Evidemment, j'avais merdé, je "foire toujours tout", de toute façon. Cette phrase résonne encore dans ma tête. 
Au début, j'ai trouvé refuge chez des potes, les compatissants qui te réconfortent et puis les blasés pour qui Nath' était devenue une connasse, une salope qui a gardé l'appart' et la gamine. J'ai pas supporté... je ne me résous toujours pas à l'appeler "mon ex", alors les insultes, c'était trop. 

Six mois, putain... six mois que je vis comme un ado, dans 35m² hors de prix et en bordel (même pas de quoi loger une machine à laver), solitaire et déprimé.
Solitaire, tous les jours, tous les soirs, toutes les semaines, tous les week-ends... ou presque. 
Pendant 48h, tous les quinze jours, je ne suis plus seul. 48 petites heures, du vendredi 18h au dimanche même heure et pas une minute de plus (Nath' veille), un rayon de soleil transperce mon quotidien miteux. Ma fille, le seul amour qu'il me reste, est avec moi. 
Ces nuits-là je dors sur le canapé, et je m'en fous. Elle prend ma chambre, mon lit, elle prend tout et je la laisse faire. 

Ce soir, je sais que je n'ai pas commis de bourde (mais quand même, je guette, on ne sait jamais), ses culottes roses sont dans la machine avec ses robes et ses collants, pardon, ses legging (cinq ans et déjà des fringues tendance, je ne m'y fais pas), et une lingette pour éviter les accidents... tuyau refilé par la fille qui s'est foutue de moi la première fois... ce bout de papier a transformé mon calvaire lessive en émerveillement à chaque fin de cycle, un truc de dingue. 
Mes chemises à moi, mes pantalons tout neufs, sont encore dans le panier à mes pieds. 
Faut pas que je merde, surtout pas. Le costume, j'en ai besoin demain. Il pourrait changer ma vie, celui-là. 
Demain j'ai un rendez-vous pour demander la garde alternée. Un dimanche, ma puce m'a demandé pourquoi elle ne pouvait pas rester. J'ai pas su quoi répondre, le coeur au bord des lèvres. La faire vivre dans ce taudis, sans chambre à elle, sans jouets, sans rien de ce qu'elle a chez sa mère? Hors de question. 
Le soir même, je surfais sur le net en quête d'un appart' plus grand, plus près de son école, et dans un immeuble sympa. 
Pour cette garde, j'ai mes chances, selon la blonde de la laverie... ouais, je lui raconte ma vie, et elle, elle, ben... elle écoute. Ca me fait du bien.

En attendant la fin de ma première lessive, je cogite et j'espère... et si c'était la dernière fois que je venais là?



5 commentaires:

  1. (je viens de changer ton lien sur mon blog, il était erroné désolée.)

    Ton texte m'a arraché des larmes ... Punaise.

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  2. dur le sort d'un père, un bien beau texte Sarah

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  3. ouh la la très beau texte, moi ça m'impressionne et ça m'a aussi beaucoup touché alors continue à écrire!

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    1. Oh ben dis donc je ne pensais pas impressionner les gens...
      Je vais rougir.
      Merci Laurie!!

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